Written by

Conférence End Ecocide on Earth : les podcast

2. Mobilisations| Views: 1265

Comme nous l’avions indiqué dans un article précédent, une grande Conférence s’est tenu les 13 & 14 octobre à l’EESC (European and Economic Social Committee) à Bruxelles sur l’initiative d’End Ecocide on earth. Elle a réuni de nombreux experts de nationalités et de domaine d’expertise très variés (scientifiques, procureurs, anciens Juge, juristes, peronnsalités politiques) autour de l’opportunité d’une reconnaissance internationale des crimes environnementaux et des moyens de la mettre en œuvre aux niveaux national, européen et international.

Malgré la diversité de leurs approches et de leurs expertises, leurs interventions ont révélés de multiples points de convergence :

  • Le droit de vivre dans un environnement sain (intrinsèque à la la notion d’”écocide”) est intimement liée aux droits fondamentaux.
  • La notion juridique d’écocide, dans sa version anthropocentrée, peut garantir ce droit.
  • La conscience que cette notion juridique est extrêmement complexe à établir et faire respecter, compte tenu des conflits d’intérêts existants au sein des grandes institutions et de la pression des lobbies industriels
  • Le manque d’indépendance et les dysfonctionnements des institutions politiques, juridiques et médiatiques, quelque-soit l’échelle considérée. Nombre de ces institutions, destinés à défendre et faire respecter l’intérêt général et citoyens, sont de fait, victimes de la collusion d’intérêts de leurs agents, sinon de leur corruption.

Vous trouverez ici le résumé de cette journée.

Damien Short – Histoire de l’écocide

DamienShort

Directeur de l’Ecocide Project au sein l’Ecole des Hautes études de l’Université de Londres
“Vous ne pouvez pas divorcer la politique des processus politiques d’’élaboration des lois.
Damien Short a eu l’occasion de faire pour l’assistance un bref rappel historique de la notion juridique d’écocide – un terme apparu dans les années 1970, dans la bouche d’Arthur Galston, au sujet de l’utilisation de l’Agent Orange par l’armée américaine dans la guerre du Vietnam. Au cours de ses recherches, il a été amené à enquêter sur les personnalités et les enjeux politiques à l’origine de sa disparition progressive de l’agenda politique des organisations internationales : Le plus souvent, la décision d’écarter la notion d’écocide reposait sur la décision d’une personnalité politique clé, Ainsi, c’est vraisemblablement le président de séance qui écarte la notion d’écocide au cours de la réunion préliminaire à la rédaction de l’Introduction au Statut de Rome instituant la Cour pénale internationale. Dans le contexte de la course aux armements nucléaires, la notion d’écocide était une contrainte juridique inacceptable au vu des intérêts géopolitiques et stratégiques des grandes puissances. Un des exemple actuel les plus emblématique, est le soutien sans faille du gouvernement britannique à l’extraction des gaz de shiste par fracturation hydrolique. L’analyse attentive des réseaux politiques et économiques britanniques, révèle de forts liens potentiels de corruption et de collusion d’intérêts.


Prof. Laurent Neyret – Définir l’écocide

Laurent Neyret

Directeur de l’Ecocide Project au sein l’Ecole des Hautes études de l’Université de Londres

Professeur Laurent Neyret réfléchit dans ses travaux sur les différentes définitions possibles de l’écocide, soulignant les différences qui existent entre la notion d’écocrime (qui touche à la sécurité de l’environnement) et celui d’écocide (qui porte atteinte à l’environnement global de la Terre). Selon lui, le dépôt de déchets toxiques, le traffic d’espères menacées, l’utilisation des pesticides… sont bien des écocides. Au cours de la conférence, il a également souligné ce fait majeur, que la criminalité environnementale est devenue le troisième crime international le plus rentable après le trafic de drogues et celui des êtres humains, et qu’il est donc intrinsèquement lié à des enjeux de sécurité publique. Une loi préventive contre l’écocide doit et va changer cet état de fait.


Nick Meynen – Presentation of the EJOLT

 

Nick Meynen

Responsable de la communication pour les politiques mondiales de développement durable, Bureau européen de l’environnement.

“Nous devons briser ce mythe qui veut que l’on s’enrichisse d’abord, puis que l’on se souciera de l’environnement par la suite.”

Responsable de Communication au Bureau européen pour l’environnement, Nick Meynen était là pour présenter l’Atlas mondial de la Justice environnementale : une plate-forme de cartographie en ligne, pédagogique et interactive, détaillant près de 1000 conflits environnementaux à travers le monde (et la liste continue de s’allonger). Il a notamment souligné que les populations indigènes étaient les populations les plus affectés par la criminalité environnementale. Ainsi, alors qu’ils ne représentent que 4% de la population mondiale, ils sont impliqués dans 46% de tous les conflits environnementaux cartographiés.
L’équipe d’End Ecocide a collaboré avec l’équipe de EJOLT pour mettre au point une carte représentant tous les cas d’écocide dans le monde. L’Atlas permettra un accès plus aisé à l’information, mais aussi la coordination des divers groupes de travail sur des questions connexes, tout en participant à une meilleure visibilité des conflits environnementaux : une aide précieuse pour la reconnaissance du crime environnemental.


Jan Van de Venis – Ecocide et droits de l’Homme

Jan Van de Venis

Président Stand Up For Your Rights et Directeur Juridique de WaterLex.
« C’est génial la façon dont nous pouvons utiliser l’Internet pour pousser la reconnaissance des droits de tous ceux qui aspirent, aujourd’hui et demain, à vivre dans un environnement sain.
Jan van de Venis a animé la première rencontre sur l’écocide et les Droits de l’homme. Il a rappelé le développement progressif de la notion de Droits de l’homme : des droits civils et politiques aux droits sociaux et économiques, et jusqu’à leur élargissement aujourd’hui au droit à la santé et à un environnement sain. Il s’est notamment interrogé lors de cette conférence sur les raisons pour lesquelles les Droits Fondamentaux n’ont pas inclus, dés l’origine, des considérations environnementales.

Il a également présenté Grrowd, une plate-forme mondiale de crowdfunding consacrées au soutien financier des actions en justice intentées contre les violations aux droits économiques, sociaux et environnementaux.


Marie-Odile Bertella-Geffroy – L’écocide et le droit à la santé

Judge Marie Odile

Juge, vice-président de la Cour de Paris et coordinateur au Secrétariat de la Santé Publique de Paris.
« La justice Française n’est pas indépendante : le procureur de la république français est sous les ordres du ministère de la justice« 

L’ancien juge Marie-Odile Bertella-Geffroy, qui a notamment défendu les victimes de Tchernobyl et de l’exposition à l’amiante, a souligné le manque d’indépendance de la justice française. Ainsi dans l’affaire de l’Amiante, elle a rappelé que ce sont les associations de victimes, comme dans tous les scandales sanitaires, qui ont permis l’ouverture d’un dossier d’instruction. Elle a également souligné l’inadaptation juridique actuelledu système législatif français à une pénalisation des crimes environnementaux ou sanitaires en France, à l’inverse de l’Italie par exemple, où deux industriels ont été condamnés, suite à un procès public, à 16 et 18 ans d’emprisonnement pour avoir contrevenu à la l’interdiction de l’utilisation de l’amiante.


Dr. Dominique Belpomme – Écocide et le droit à un environnement sain

Dominique Belpomme

Professeur de médecine oncologique à l’Université Paris V, Président de l’institut de recherche européen sur le cancer et l’environnement.
« Construire un droit de l’environnement sans tenir compte des problèmes de santé publique, est une impasse
Dr Belpomme a présenté l’Appel de Paris: une déclaration internationale sur les maladies liées à la pollution chimique, signées par des milliers de scientifiques, 10 Prix Nobel de la Paix en médecine, 1.500 ONG, 350 000 citoyens et le Comité permanent des médecins européens représentant 2 millions de médecins dans l’UE. Ainsi qu’il l’a souligné, les lien entre les écocide et leurs impacts sanitaire ne fait plus aucun doute. Nous avons selon lui affaire à un véritable déni politique et sociétal, quant aux dangers que la pollution chimique fait aujourd’hui peser sur la survie de l’espèce humaine. Les normes sanitaires en vigueur sont très éloignées de considérations scientifiques et ne reflètent le plus souvent que des intérêts économiques et politiques, « l’homme en est la première victime »…
Le professeur Belpomme a ainsi réitéré son soutien à l’initiative d’End Ecocide.


Gert-Peter Bruch – Écocide et les droits des peuples autochtones

Gert-Peter Bruch

>ONG Planète Amazone
« Nous devons travailler ensemble et trouver des moyens pertinents pour utiliser cette loi contre l’écocide, notamment dans le sens d’un écocide culturel« 
Gert-Peter Bruch, président de l’ONG Planète Amazone, a lié la notion d’écocide aux droits des peuples autochtones. Sa présentation a permis de préciser la définition de ce que nous appelons l’«écocide culturel » : tout dommage, atteinte ou destruction des conditions du maintien de la vie culturelle des communautés autochtones, directement ou indirectement causé par les actes d’une personne, entreprise, organisation, ou toute autre personne morale.


Dr. Sandor Fülop – Écocide et les droits des générations futures (Hongrie)

Sandor Fülop

Ancien commissaire de médiation parlementaire pour les générations futures en Hongrie.
Pourquoi ne pourrions-nous pas donner des droits aux générations futures?»
Citant Ban Ki Moon, Sando Fülop a interrogé l’assistance :«Les Droits d’un individu ne doivent pas être conditionnés par sa date de naissance».
Il existe une théorie en économie, appelée Préférence temps, qui affirme que rien ne sera plus valable demain qu’aujourd’hui. Dr Sandor Fülöp, ancien Commissaire de médiation des futures générations en Hongrie, a ainsi affirmé que nous devrions pouvoir, au nom des générations futures, utiliser le droit pénal contre ceux qui commettent des écocides susceptibles de leur être dommageables.


James Skelly – Le passage de l’économie mondiale au développement durable (Etats-Unis)

Dr James Skelly

Directeur de l’Institut Baker pour l’étude de la paix et des conflits, Juniata College, en Pennsylvanie.
« Nous savons que nous aurions dû prévenir le génocide au cours de la Seconde Guerre mondiale. Nous savons aujourd’hui ce qui se passe et nous savons comment agir: Nous devons mettre fin aux écocides »
James Skelly a souligné l’importance, pour la paix, de certaines conditions environnementales, en comparant notre situation actuelle avec celle des années 1930, lorsque chacun savait que quelque chose de terrible allait se passer, sans savoir exactement trop quoi. Le professeur Kelly a animé la deuxième table ronde de la journée, axée sur le changement climatique, la sécurité environnementale, et l’investissement responsable.


Roger Cox (Netherlands)

Roger Cox

Avocat et auteur de “Revolution Justified”
Le débat scientifique est terminée, les dangers liés au changement climatique sont réels, sérieux et nous affecterons tous »
Roger Cox est venu nous présenté l’initiative juridique de 900 citoyens néerlandais contre le gouvernement néerlandais pour violation des droits de l’homme (droit à la vie, droit à la vie familiale) et pour son inaction sur le dossier du changement climatique alors même qu’il s’était engagé, lors de la COP16 de Cancun, à une réduction des émissions de GES de 40% à l’horizon 2020,voir : https://www.revolutionjustified.org/climate-costume)
Roger Cox a établit une comparaison entre cette initiative et celui de l’initiative End Ecocide, en en soulignant les similarités : Deux approches privilégiant le pouvoir législatif, évoquantles droits de l’Homme, le principe de précaution et le devoir d’assistance à personne en danger. Cette initiative reste nationale, mais il n’est pas exclu qu’elle puisse résonner à l’échelle internationale.
A cet égard, il a expliqué que les rapports du GIEC avaient une autorité internationale, sur laquelle cette initiative populaire pouvait s’appuyer très largement. Mais si le devoir d’assistance à personne en danger peut théoriquement juridiquement s’appliquer au changement climatique, la responsabilité du gouvernement néerlandais lorsque l’on considère l’échelle internationale de ce phénomène.


Wouter Veening – Écocide et la sécurité environnementale

Wouter Veening

Président de l’Institut pour la sécurité environnementale. »
« Nous portons un tord considérablement à notre environnement planètaire. Il est temps d’agir »

Wouter Veening est président de l’Institut pour la sécurité de l’environnement. Il a examiné le concept d’’écocide du point de vue de la sécurité environnementale. Si le changement climatique est le problème majeur auquel nous devons faire face aujourd’hui, il est difficile d’en identifier les responsables.
Wouter Veening pose d’importantes questions, telles que le sort des des réfugiés climatiques, à commencer par ceux des États insulaires susceptibles de disparaître avec la montée du niveau de la mer.
Il a également souligné l’augmentation de la prévalence de la criminalité environnementale organisée et les graves menaces qu’elle fait peser à la sécurité internationale lorsqu’elle fusionne avec des réseaux de corruption, de blanchiment d’argent, de contrebande d’armes… etc.


Anne van Schaik – Écocide, la responsabilité des entreprises et l’investissement responsable

Les Amis de la Terre Europe
Anne van Schaik“L’accaparement des terres auquel on assiste actuellement, est lié à une augmentation de la demande foncière en provenance des secteurs de l’extraction, du tourisme, des grands projets d’infrastructures…, etc mais aussi en raison des politiques de développement des biocarburants en Europe : « La terre est accaparée car il est juridiquement possible de le faire « 
Anne van Schaik (Les Amis de la Terre-Europe) s’est penché, lors de son intervention, sur l’importance sociale de l’investissement foncier responsable et sur la question de l’accès au droit des populations vulnérables dans les affaires d’accaparement de terres. En Afrique, c’est un phénomène en grande augmentation, essentiellement lié aux stratégies de développement des grandes entreprises multinationales avec la bienveillance des gouvernements africains. Les Amis de la Terre et bien d’autres ONG, travaillent actuellement sur un certain nombres de lois européennes susceptibles de pouvoir réglementer les investissements financiers des entreprises dans les pays en voie de déveoppement. L’une des questions clés repose sur lemanque de transparence des politiques foncières. Une loi sur l’écocide permettrait un meilleur accès au droit des populations touchées, pour qu’ils soient mieux en mesure de défendre leurs terres face aux multinationales.


Ahmed Alami – La Charte de Bruxelles

Ahmed Alami

Ancien ministre de l’Environnement marocain 
« La Charte de Bruxelles demande la mise en place d’une Cour pénale euroépenne et internationale de l’environnement et de la santé : Ce n’est pas là seulement un défi juridique qu’une véritable révolution pour la vie »
Le Ahmed Alami a été chargé de présenter la Charte de Bruxelles à l’assistance. Le 30 Janvier 2014, une coalition d’organisations se sont réunis au Parlement européen pour le lancement de la «Charte de Bruxelles» : appel à destination de la communauté internationale, celle-ci milite pour la mise en place d’une Cour pénale européenne et internationale de l’environnement et de la santé. Cet appel réclame également la reconnaissance des crimes contre l’environnement en tant que crimes contre l’humanité et la paix au sein des Nations Unies. L’importance de la mise en place d’un droit internationale est particulièrement évident dans le cas des désastres environnementaux comme celui de Bhopal, de Tchernobyl ou du dumping de déchets toxiques, dont les impacts environnementaux et sanitaires ne connaîssent pas de frontières


Kirsten Meersschaert Duchens

Kirsten Meersschaert Duchens

Coordonnatrice régionale pour l’Europe, Coalition pour la Cour pénale internationale.
« Il est urgent d’introduire la question de l’écocide dans les débats de justice pénale internationale

Kirsten Meersschaert Duchens a commencé son discours en rappelant l’objectif principal de la Cour pénale internationale : la défense des peuples contre les violations des droits de l’homme. Or de nombreux exemples historiques récents démontrent que l’environnement est très souvent une cible stratégique et économique majeur.
A l’heure actuelle, le crime de guerre environnemental, tel qu’il est définit dans le Statut de Rome (8.2.b.iv Art), présente un caractère très restrictif : Les dommages environnementaux doivent se produire au cours d’un conflit armé international; ils doivent délibérément viser l’environnement; ils doivent être très évères et avoir des conséquences à long terme ; objectifs militaires poursuivis par le bélligérant mis en cause doivent être pris en considération. Tel qu’il est rédigé, le Statut de Rome est nettement insuffisant pour pouvoir s’appliquer à la plupart des atteinte environnementales en temps de guerre, et ne s’applique aucunement à celles commises en temps de paix.
Kirsten Meersschaert Duchens s’est donc appliqué à expliquer la façon dont le Statut de Rome devrait être modifié pour que les atteintes graves à l’environnemental puissent être considéré comme des crimes. Ce processus est loin d’être aisé, mais peut être atteint. Le principal défi reste à ses yeux de nature politique, plus que de nature procédurale.


Sur ces mots, la conférence a prit fin. Mardi, un groupe d’experts se sont rencontrés pour discuter de la meilleure façon de faire adopter une loi préventive sur les écocides, tandis qu’un atelier était mis en place autour des défis propres à l’ICE (initiative citoyenne européenne) à l’intention des jeunes volontaires d’End Ecocide International.

Prisca Merz – Initiatrice de l’Initiative End Ecocide

 

Prisca Merz« L’excellente participation à cette conférence démontre l’énorme intérêt que suscite le concept d’’écocide dans toute l’Europe. Nous avons réuni des citoyens, des scientifiques, des avocats, des ONG et des bénévoles : tous partagent un objectif commun. Il est remarquable de constater tout ce qu’un mouvement populaire peut réaliser et nous continuerons à faire tout notre possible pour assurer une protection juridique efficace des écosystèmes.
Le processus d’End Ecocide on Earth ne fait que commencer, et nous vous invitons à nous rejoindre dans cette aventure, en commençant par ajouter votre signature sur notre pétition en ligne : www.endecocide.org »


Valerie Cabanes – End Ecocide

 

ValerieCabanes

Porte-parole de l’Initiative End Ecocide. Coordinatrice du groupe de travail juridique international pour la rédation d’un amendement au Statut de la Cour pénale internationale. Rédactrice de la Charte de Bruxelles.

« Ce qui s’est passé est totalement magique, je ne sais pas comment nous sommes parvenus à vous réunir tous ici… »

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Facebook
Twitter
Instagram